Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

2024-02-01T10:46:53+01:00

Nous sommes sans arrêt confrontés à des séparations ...

Publié par ♥ Rose - lyne du sud ♥
 Nous sommes sans arrêt confrontés à des séparations ...
Livre de Christian Bobin, « Le murmure », écrit en grande partie sur son lit d’hôpital. « Le murmure est la trace d'une course entre l'amour et la mort, annonce la quatrième de couverture. À la fin c'est l'amour qui gagne, faisant de ce chant un sommet d'humanité. Le destin qui s'achève sur une telle victoire ne s'arrête pas là. Il commence. » Christian Bobin n’a jamais cessé de parler de cette joie des commencements. Comme dans ce numéro spécial du journal La Vie : "Vivre le deuil"… « Cette croissance des gens après leur mort est très étrange, écrit-il. Comme si la vie ne finissait pas. comme si elle était un livre dont aucun lecteur ne pourra jamais dire : « Ça y est, je l’ai lu. »… »
 
JL 21/01/24
 
« Nous sommes sans arrêt confrontés à des séparations.
La vie a une main qui plonge dans notre corps,
se saisit du cœur et l’enlève.
Pas une fois, mais de nombreuses fois.
 
En échange, la vie nous donne de l’or.
Seulement, nous payons cet or à un prix fou
puisque nous en avons, à chaque fois, le cœur arraché vivant…
Chaque séparation nous donne une vue de plus en plus ample
et éblouie de la vie.
 
Les arrachements nous lavent.
Tout se passe, dans cette vie,
comme s’il nous fallait avaler l’océan. Comme si périodiquement nous étions remis à neuf
par ce qui nous rappelle de ne pas nous installer,
de ne pas nous habituer.
 
La vie a deux visages :
un émerveillant et un terrible.
Quand vous avez vu le visage terrible,
le visage émerveillant se tourne vers vous
comme un soleil.
 
Il reste d’une personne aimée une matière très subtile,
immatérielle qu’on nommait avant, faute de mieux, sa présence.
Une note unique dont vous ne
retrouverez jamais l’équivalent dans le monde.
 
Une note cristalline, quelque chose qui vous donnait de la joie à penser à cette personne,
à la voir venir vers vous.
 
Comme la pépite d’or trouvée au fond du tamis,
ce qui reste d’une personne est éclatant.
Inaltérable désormais.
 
Alors qu’avant votre vue
pouvait s’obscurcir pour des tas de raisons,
toujours mauvaises (hostilités,
rancœurs, etc.),
là, vous reconnaissez le plus profond et le meilleur de la personne.
 
Toutes ces choses impondérables qui rôdent
dans l’éclat d’un regard,
passent par un rire, par des gestes,
qui faisaient que la personne était unique,
reviennent à vous par la pensée.
 
Mon père, mort il y a maintenant treize ans,
n’arrête pas de grandir, de prendre
de plus en plus de place dans ma vie. Cette croissance des gens après leur
mort est très étrange.
 
Comme si la vie ne finissait pas, comme si elle était un livre
dont aucun lecteur ne pourra jamais dire :
« Ça y est, je l’ai lu. »
La vision de mon père change avec le temps,
tout comme moi-même je change.
Ceux qui ont disparu mêlent leur visage au nôtre.
 
Nous sommes étroitement liés, souterrainement, dans une métamorphose incessante.
C’est pourquoi il est impossible de définir aussi bien la vie que la mort. On ne peut que parler d’une sorte de flux
qui sans arrêt se transforme, s’assombrit puis s’éclaire de
façon toujours surprenante.
 
La mort a beaucoup de vertus, notamment celle du réveil.
Elle nous ramène à l’essentiel,
vers ce à quoi nous tenons vraiment. »
 
Entretien avec Christian Bobin
extrait du numéro spécial de La Vie : "Vivre le deuil"
 
Texte transmis par Christine Crabbe
 
Et partagé sur Facebook par

Voir les commentaires

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
commentaires

Girl Gift Template by Ipietoon - Hébergé par Overblog