par Osho
Article publié en 2 parties
Osho amène ici une vision nouvelle peu connue en Occident qui est intéressante notamment pour tous ceux qui se sont intéressés aux actions politiques socialistes ou anarchistes. Il explique pourquoi les révolutions sociales (communistes ou autres) ne peuvent pas réussir et sont condamnées à amener au pouvoir un système dictatorial. Sa vision est celle d’une rébellion, elle se base sur l’individu. Si chaque individu change, le monde changera...
Le texte reproduit ici est une transcription d’un discours prononcé par Osho devant une audience. Une personne lui a posé cette question :
Voici l'histoire d'un disciple qui vient voir son maître pour lui demander si l’homme est libre.
Le maître dit à son disciple de se tenir debout puis il lui demande de lever un pied. Le disciple sur une jambe, l'autre en l'air, comprend encore moins ce qui se passe. Le maître lui demande alors de lever le deuxième pied.
Osho, peux-tu nous parler de la différence entre «la liberté pour» et «la liberté de» ?
Réponse d’Osho (1ère partie) :
La «liberté de quelque chose» est ordinaire, banale. L’homme a toujours essayé d’être libre des choses. Ce n’est pas créatif. C’est l’aspect négatif de la liberté. La «liberté pour quelque chose» est au contraire la créativité. Vous avez une certaine vision que vous souhaiteriez faire et vous voulez avoir la liberté de le faire.
La «liberté de quelque chose» provient toujours du passé alors que la «liberté pour quelque chose» est orientée vers l’avenir.
La «liberté pour quelque chose» a une dimension spirituelle car vous avancez dans l’inconnu et peut-être qu’un jour vous irez même dans l’inconnaissable. Cette liberté va vous donner des ailes. La «liberté de quelque chose» peut au mieux vous retirer les menottes des mains. Et sachez que ce n’est pas toujours bénéfique, toute l'histoire de l’humanité en est la preuve. Les gens n’ont jamais pensé à la seconde liberté sur laquelle j’insiste.
Ils ne pensent qu’à la première forme de liberté parce qu’ils n’ont pas pris conscience de la seconde. La première liberté est visible : ce sont les chaînes à vos pieds et les menottes à vos mains. Vous voulez en être libre mais ensuite, qu’allez-vous faire de vos mains libres? Il est même fort possible que plus tard vous regrettiez d’avoir demandé la «liberté de. »
Cela c’est d’ailleurs produit à la prison de la Bastille pendant la révolution française. Cette prison était la plus réputée de l’époque, elle était réservée à ceux qui étaient condamnés à perpétuité. Vous ne sortiez jamais vivant de cette prison. Une fois que quelqu’un de nouveau était incarcéré, les gardiens, paraît-il, jetaient même les clés au fond d’un puits qui se trouvait dans l’enceinte de la Bastille. Ils savaient que les serrures ne seraient plus jamais utilisées. Il y avait plus de cinq mille prisonniers dans cette prison et ils ne sortaient jamais vivants de leur cellule alors pourquoi garder autant de clés?
Bien sûr, les révolutionnaires français ont pensé que la première chose à faire était de libérer les prisonniers de la Bastille. C’est inhumain de mettre quelqu’un dans une petite cellule sombre jusqu’à sa mort et cela quelque soit ce qu’il ait fait. Ils pouvaient rester enfermés cinquante ou même soixante ans. Une telle attente est une immense torture pour l’âme. Ce n’est pas une punition, c’est de la vengeance pure parce que ces gens ont désobéi à la loi. La punition est sans commune mesure avec les actes.
Les révolutionnaires se sont donc empressés d’aller ouvrir les cellules pour faire sortir les prisonniers. Et à leur grand étonnement, la plupart ne voulaient pas sortir de leur cachot.
Vous pouvez comprendre pourquoi. Une personne qui a vécu pendant soixante ans dans l’obscurité ne peut plus supporter le soleil. Elle ne veut plus s’exposer à la lumière. Ses yeux sont devenus très délicats. Et puis pourquoi faire? Elle a maintenant quatre vingt ans. Quand elle est entrée dans la prison, elle en avait vingt. Toute sa vie s’est passée dans une petite cellule obscure. C’est devenu en quelque sorte sa maison.
Et donc les révolutionnaires français sont arrivés pour libérer les prisonniers. Ils ont brisé leurs chaînes et leurs menottes puisqu’il n’y avait plus de clé. Mais les prisonniers résistaient, ils ne voulaient pas quitter la prison. Ils disaient: «Vous ne comprenez pas notre situation. Un homme qui a été soixante ans dans cette prison, que fera-t-il à l’extérieur? Qui va lui donner de la nourriture? Ici, la nourriture lui est donnée et il peut se reposer en paix dans sa petite cellule obscure. Il sait qu’il est presque mort. Dehors, il ne pourra pas retrouver sa femme ou savoir ce qu'il lui est arrivée. Ses parents doivent être déjà morts. Ses amis sont peut-être aussi morts ou ils l’auront complètement oublié. Et personne ne va lui donner du travail. Qui veut d’un homme qui n’a pas travaillé pendant soixante ans? Et surtout d’un homme qui sort de la prison de la Bastille là où les plus grands criminels se trouvent? Rien que prononcer le mot «Bastille» suffira pour se voir refuser n’importe quel travail. Pourquoi nous forcez-vous à sortir? Où est-ce que nous allons dormir? Nous n’avons pas de maison. Nous avons presque oublié les lieux où nous vivions. Et depuis d’autres personnes doivent vivre là où nous étions. En soixante ans, le monde a sûrement changé, nous ne pourrons pas nous adapter. Ne nous torturez pas une fois de plus. Nous avons été suffisamment torturés. »
Et quelque part, ce que disaient les prisonniers était tout à fait compréhensible. Mais les révolutionnaires sont des gens têtus. Ils n’ont pas voulu écouter. Ils ont forcé ces hommes à sortir de la Bastille mais le soir même, presque tout le monde était déjà revenu. Ils ont dit : «Donnez-nous s’il vous plaît quelque chose à manger, nous sommes affamés. »
Quelques-uns uns sont revenus en plein milieu de la nuit et ils ont dit : «Rendez-nous nos chaînes car nous ne sommes pas capables de dormir sans elles. Nous avons dormi pendant des dizaines d’années avec ces chaînes et ces menottes et aujourd’hui elles sont devenues un peu comme une partie de notre corps. Nous n’arrivons pas à dormir sans ces chaînes. Nous voulons retourner dans nos cellules, nous y étions parfaitement heureux. Ne nous imposez pas votre révolution. Nous sommes de pauvres gens. Vous pouvez faire votre révolution ailleurs que dans cette prison. »
Les révolutionnaires étaient en choc. Mais, cet incident montre que «la liberté de quelque chose» n’est pas nécessairement une bonne chose!
Vous pouvez voir que ceci est vrai dans le monde entier. Certains pays se sont libérés de l’empire britannique, d’autres de l’empire espagnol ou encore portugais par exemple. Mais souvent leur situation est encore bien pire que lorsqu'ils étaient des colonies. Au moins, dans leur esclavage, ils s'y étaient habitués. Ils avaient abandonné toute ambition, ils acceptaient leur situation comme leur destin.
La liberté de l'esclavage crée tout simplement le chaos.
Toute ma famille a été engagée dans la lutte pour l’indépendance de l’Inde. Ils ont tous été en prison. Leur éducation a été fortement perturbée. Aucun n’a pu obtenir des diplômes à l’université car ils ont tous étaient arrêtés avant de passer les examens. L'un a fait trois ans de prison, un autre quatre ans. Et ensuite, il était trop tard pour reprendre des études de nouveau et ils sont devenus des résistants. En plus, en prison, ils avaient rencontré tous les grands chefs de la révolution. Toute leur vie était désormais dévouée à la révolution.
J’étais encore très jeune à ce moment là mais je me rappelle que j'en discutais déjà avec mon père et mes oncles. Je leur disais : «Je peux comprendre que l’esclavage est horrible et que cela vous déshumanise, vous humilie, ne respecte pas votre dignité d'être humain.
Cela doit être combattu. Mais ma question est la suivante : qu’allez-vous faire lorsque vous serez libre? Vous savez vivre dans l’esclavage, est-ce que vous savez vivre dans la liberté? Dans l’esclavage, un certain ordre est maintenu sinon, vous êtes arrêté ou tué. Savez-vous que dans la liberté, il en sera de votre responsabilité de maintenir l’ordre? Personne ne vous tuera et personne ne sera responsable de ceci. Est-ce que vous avez demandé à vos dirigeants pour quoi cette liberté sera-t-elle faite?
Et je n’ai jamais reçu aucune réponse. Ils ont dit : «En ce moment, nous sommes tellement occupés à nous débarrasser de l’esclavage que nous verrons plus tard, ce que nous ferons avec la liberté. »
J’ai répondu : «Votre attitude n’est pas scientifique. Si vous détruisez votre vieille maison, vous devriez déjà préparer les plans de la nouvelle maison.
Il est préférable de préparer le projet de la nouvelle maison car sinon ensuite vous serez sans maison et vous souffrirez inutilement. Car, il est évident qu’il vaut mieux avoir une vieille maison que de ne pas en avoir du tout! »
Des grands chefs de la révolution venaient parfois visiter ma famille. Et c’était toujours mon argument. Et je n’ai jamais trouvé un seul révolutionnaire qui puisse m’expliquer ce qu’ils allaient faire de la liberté.
La liberté est finalement arrivée avec l’indépendance du pays et que s’est-il passé? Les hindous et les musulmans se sont entretués par millions. Jusqu’à présent ils avaient été sous le contrôle des forces britanniques. Dès que les Britanniques se sont retirés de l’Inde, des émeutes ont commencé. La vie de chacun était en danger. Des villes entières étaient en feu, des trains étaient attaqués et les gens brûlés vifs dans les trains.
Je me suis alors fait cette réflexion : «C’est quand même étrange. Sous l’esclavage, il n’y avait pas de tels problèmes et maintenant que la liberté est là, la violence est partout. La simple raison c'est que les gens n’étaient préparés à vivre cette liberté. »
Les divisions du pays sont soudainement apparues avec d’un côté les hindous et de l’autre les musulmans. Personne n’y avait pensé. Dans tout le pays, c'était le chaos et les gens qui étaient arrivés au pouvoir avaient une réelle compétence pour brûler les ponts et les prisons, pour tuer les gens qui avaient réduit le pays à l'esclavage. Mais leur compétence n’avait rien à avoir avec ce qu’il faut savoir pour reconstruire un nouveau pays.
Mais c'étaient les leaders de la révolution, alors naturellement ils sont arrivés au pouvoir. Ils s'étaient battus, ils avaient gagné et alors le pouvoir est arrivé entre leurs mains. Mais ce n'était pas les bonnes mains
Il ne faudrait jamais donner le pouvoir à un révolutionnaire parce que le révolutionnaire sait comment faire un sabotage mais il ne sait pas comment créer. Il ne connaît que la destruction. Il devrait être honoré, respecté, on lui décernerait une médaille d'or mais on ne devrait jamais lui donner le pouvoir.
Il faut au contraire trouver les gens qui soient créatifs mais ce sera des gens qui n'ont pas participé à la révolution.
C’est une question délicate car les personnes créatives sont intéressées par leur créativité et non pas par celui qui dirige le pays. Quelqu’un doit forcément diriger le pays que ce soit les Indiens ou les Britanniques, peu importe. Les personnes créatives sont seulement concernées par mettre toute leur énergie dans leur travail créatif et alors elles ne sont jamais dans les rangs des révolutionnaires. Mais du coup, les révolutionnaires ne veulent jamais qu'elles aient le pouvoir. Ils n’ont pas participé à la révolution, pourquoi devraient-elles obtenir le pouvoir?
C’est ainsi que toutes les révolutions ont à chaque fois échoué. Et la raison est que ceux qui ont fait la révolution n’ont qu’un type de compétence et les personnes qui elles sont capables de créer un nouvel ordre social, un nouveau pays et de responsabiliser les gens appartiennent à un autre groupe. Les personnes créatives ne participent pas à la destruction, au meurtre. Mais, du coup, elles ne peuvent pas accéder au pouvoir. Le pouvoir tombe dans les mains de ceux qui ont combattu. Donc, naturellement, toute révolution échoue forcément tant que ce que je viens de dire n’a pas été clairement compris.
La révolution a deux étapes et il faudrait en fait deux types de révolutionnaires. Le premier est lié à la «liberté de quelque chose. » Et puis un second qui travaille lorsque le premier a terminé. Le second serait quant à lui lié à la «liberté pour créer quelque chose. » Mais, une telle combinaison, un tel partenariat est difficile à réaliser. Qui peut organiser une telle coopération? Les gens ont une telle soif de pouvoir. Quand les révolutionnaires sont victorieux, ils s’approprient le pouvoir. Ils n’ont pas la sagesse de le donner à quelqu’un d’autre et c’est ainsi que le pays tombe en général dans le chaos. Et ensuite chaque jour, la situation se dégrade peu à peu dans tous les domaines.
C’est pourquoi je ne suggère pas de faire la révolution. J’enseigne au contraire la rébellion. La révolution est faite par la foule. La rébellion est faite par l’individu. C’est l’individu qui se change lui-même. Il ne se préoccupe pas des structures du pouvoir. Il met son énergie dans la transformation de son être pour donner naissance à un nouvel homme. Et si tout le pays est rebelle…
Ce qui est merveilleux au sujet de la rébellion c’est que les deux types de révolutionnaires peuvent y participer. Car dans la rébellion, il y a beaucoup à détruire et beaucoup à construire. Certaines choses doivent être détruites pour pouvoir créer ensuite. Donc, la rébellion a un attrait pour tout le monde, ceux qui sont intéressés par la destruction et ceux qui sont intéressés par la créativité.
La rébellion n’est pas un phénomène de masse, c’est de votre propre individualité dont il est question. Et si des millions de personnes passent à travers cette rébellion, alors le pouvoir des pays, des nations, sera dans les mains de ces personnes qui sont rebelles. La révolution ne peut réussir que dans la rébellion. Sinon, la révolution reste profondément divisée.
La rébellion est une, unie.
Dans la rébellion, rappelez-vous bien que la destruction et la créativité avancent main dans la main, elles se soutiennent mutuellement. Ce ne sont pas des phénomènes séparés. Si vous les séparez comme dans le cas des révolutions alors c'est la même histoire qui se répète.
Fin de la première partie
Extrait de La liberté – Le courage d’être soi-même. Osho
Peut-on changer le monde ?
Faut-il faire une révolution sociale ? L'enseignant spirituel Osho nous met en garde contre ce type d'utopisme politique et nous rappelle que c'est en commençant par nous-même que le monde changera.
Le texte reproduit ici est une transcription d’un discours prononcé par Osho devant une audience. Une personne lui a posé cette question :
Voici l'histoire d'un disciple qui vient voir son maître pour lui demander si l’homme est libre.
Le maître dit à son disciple de se tenir debout puis il lui demande de lever un pied. Le disciple sur une jambe, l'autre en l'air, comprend encore moins ce qui se passe. Le maître lui demande alors de lever le deuxième pied.
Osho, peux-tu nous parler de la différence entre «la liberté pour» et «la liberté de» ?
Réponse d’Osho (2ème partie) :
Dans votre question, l’histoire que vous racontez n’est pas complète. C’est un conte mystique qui est très beau.
Un homme vient voir un maître pour savoir en quoi l’être humain est vraiment indépendant, libre. Est-ce que l’homme a une liberté totale ou est-ce qu’il est limité? Est-ce qu’il existe quelque chose comme le destin, le sort ou Dieu qui fait qu’à un certain niveau vous ne pouvez pas être libre?
Le mystique a répondu à sa manière, pas logiquement mais d’une manière vivante et concrète. Il dit à l’homme qui est venu le voir : «lève-toi! »
L’homme a sûrement pensé que c’était une réponse un peu stupide de la part du maître : «Je pose juste une question et il me demande de me mettre debout. »
Mais il s’est dit : «Essayons et on verra bien ce qui va se passer»
Il se leva. Et le mystique dit : «Maintenant, lève une jambe. »
Le visiteur a dû certainement se dire à ce moment là qu’il était face à un fou. Qu’est-ce que lever une jambe peut bien à voir avec la liberté et l’indépendance de l’être humain? Mais maintenant qu’il était venu…et il devait y avoir de nombreux disciples tout autour qui observaient la scène. Le mystique était tellement respecté que le simple fait de ne pas faire ce qu’il demandait aurait été irrespectueux. Et puis, l’homme se dit qu’il n’avait rien à perdre. Il décida donc de lever en l’air une de ses jambes. Il se tenait donc en équilibre sur une seule jambe.
Et là, le maître dit : «C’est bien. Encore une dernière chose. Maintenant, lève le second pied. »
C’est impossible! L’homme dit : «Vous me demandez quelque chose d’impossible. J’ai déjà mon pied droit levé. Je ne peux pas lever le pied gauche. »
Le maître dit : «Mais vous étiez libre. Au début, vous auriez pu soulevé le pied gauche. Ce n'était pas un ordre précis. Vous étiez complètement libre de choisir de lever le pied gauche ou le pied droit. Je ne vous ai rien précisé, vous avez décidé par vous-même de commencer par lever le pied droit. Par votre décision même, vous avez rendu impossible le fait de lever le pied gauche. Ne vous préoccupez pas du sort, du destin ni de Dieu. Pensez simplement à des choses simples. »
Quel que soit l’acte que vous faites, il vous empêche toujours de faire un autre acte qui va à l’encontre du premier. Donc, chaque acte crée une restriction. Dans cette histoire c’est très clair. Dans la vie, c’est un peu moins évident à voir car vous ne voyez pas un pied en l’air et un pied au sol. Mais, c’est toujours vrai : un acte, une décision est une restriction.
Vous êtes totalement libre avant de décider. Mais une fois que vous avez décidé, votre décision, votre choix implique automatiquement une limitation. Personne d’autre que vous n’impose cette décision. C’est la nature des choses. Vous ne pouvez pas faire simultanément des choses qui sont contradictoires. Et il est bon d’ailleurs que vous ne puissiez pas le faire. Car vous vivez déjà dans un chaos intérieur et si vous pouviez faire des choses contradictoires, vous seriez alors encore plus dans le chaos. Vous deviendriez fou. Cette limitation naturelle est une sorte de mesure de sécurité apportée par l’existence.
Au fond, vous êtes complètement libre de choisir mais une fois que vous faites un choix, votre choix amène nécessairement une restriction.
Si vous voulez rester totalement libre alors ne choisissez pas. C’est là que l’enseignement de la conscience neutre, la vigilance pure sans désirs (choiceless awareness) prend toute sa signification. Pourquoi les grands maîtres insistent-ils sur le fait qu’il faut être simplement vigilant, pleinement conscient et qu’il ne faut pas choisir? Parce que dès l’instant où vous choisissez, vous perdez votre totale liberté. Vous restez seulement avec une partie de cette liberté. Mais si vous restez au contraire sans faire de choix, votre liberté reste alors totale.
Il n’existe qu’une seule chose qui soit totalement libre et c’est la vigilance sans choix. Tout le reste est limité.
Vous aimez une femme. Elle est belle mais très pauvre. Vous aimez la richesse. Il y a une autre femme qui elle est très riche mais laide, repoussante. Et vous devez choisir. Et le problème est quel que soit votre choix vous allez souffrir. Si vous choisissez la femme qui est belle mais pauvre, vous allez regretter toute votre vie d’être passé à côté de la richesse. Car la beauté physique perd vite de son charme au bout de quelques temps de vie commune. Et puis, avec la beauté, vous ne pouvez pas acheter une maison, ni même une voiture. Vous ne pouvez rien acheter avec la beauté. Vous allez assez rapidement regretter votre choix. Le mental va commencer à se dire que c’était un mauvais choix.
Mais, si vous choisissez la femme qui est laide, vous pourrez avoir tout ce que l’argent peut acheter. Vous vivrez dans un vrai palace, vous aurez des serviteurs et tous les gadgets que vous souhaitez. Mais, le problème, c’est que vous allez devoir supporter cette femme et pas seulement la «supporter», vous allez devoir lui dire «Je t'aime. »
Et vous n’arrivez même pas à la haïr, elle est trop repoussante pour cela. Même pour haïr, il faut que la personne ne soit pas si repoussante car la haine est aussi une forme de relation. Et la laideur de cette femme, le sentiment de dégoût que vous éprouvez pour elle, va vous empêcher de profiter vraiment de vos voitures, du palace et du jardin. Et elle sait aussi que vous vous n’êtes pas marié avec elle mais avec ses richesses et c’est pourquoi elle va vous traiter comme un serviteur et non comme un véritable amant. Et c’est la vérité : vous n’aimez pas cette femme. Vous allez commencer alors à penser qu’il aurait été préférable d’avoir une maison modeste, une vie simple et d’avoir choisi la femme qui avait la beauté. Car, vous auriez au moins profité de cette magnifique femme. Vous avez été un idiot de faire ce choix.
Quel que soit le choix, vous regretterez parce que l’autre choix continuera à hanter votre esprit.
Si l'on veut la liberté absolue, alors une conscience neutre, sans désirs est la seule solution.
Et quand je vous dis que plutôt que faire une révolution, mettez votre énergie dans la rébellion individuelle, je vous oriente vers quelque chose d'entier et de complet. Dans la révolution, vous êtes nécessairement divisé. Vous êtes soit contre quelque chose, soit pour quelque chose. Mais, vous ne pouvez pas réunir ces qualités ensemble. Dans la rébellion par contre, ces deux qualités sont réunies.
Quand un sculpteur crée une statue, il fait les deux. D’abord, il taille la pierre, il détruit la pierre telle qu’elle était. Puis il crée ensuite une magnifique statue à partir de cette pierre. La destruction et la création sont réunies dans son art. Elles ne sont pas divisées.
La rébellion est aussi un phénomène où la destruction et la création sont réunies.
La révolution est divisée en deux parties. Et c’est là le danger de la révolution. Le mot est charismatique mais au cours des siècles les révolutions ont été associées avec un mental divisé. Et je suis contre les formes de divisions car elles vous rendent schizophrénique.
Aujourd’hui tous les pays qui ont été libérés de l’esclavage passent à travers une immense agonie. Il n’en était pas ainsi lorsqu’ils étaient sous des formes d’esclavage pendant trois voir même quatre cents ans.
En quelques années, les pays qui sont devenus indépendants se sont enfoncés dans un chaos qu’ils n’avaient pas connu auparavant, à tel point qu’ils se demandent : «Pourquoi avons-nous lutté pour la liberté? Si c’est cela la liberté, alors, l’esclavage était préférable. » L’esclavage n’est jamais préférable. Les gens qui réfléchissent ainsi ne comprennent pas qu’ils n’ont choisi que la moitié de la liberté.
Le seconde moitié de la liberté peut être encore atteinte mais pas par les mêmes personnes qui ont fait la révolution. Cette fois-ci, cela nécessite une intelligence et une sagesse totalement différentes. Et ceux qui ont posé des bombes, assassiné, brûlé des trains et détruit des bureaux de police ne sont pas ceux qui sont nécessaires pour cette seconde étape.
Dans ma famille, seul mon grand-père avait été contre le fait d’envoyer mes oncles à l’université. C’est mon père qui a réussi à faire en sorte qu’ils étudient à l’université. Mon grand-père expliqua son point de vue : «Faites attention, en envoyant ces jeunes à l’université en cette période de troubles politiques, il y a un risque qu’ils terminent en prison. »
La plupart des révolutions ont été menées par des étudiants, des jeunes gens qui ne savent rien de la vie. Les jeunes n’ont encore rien expérimenté de la vie. Mais, ils ont beaucoup d’énergie, ils sont remplis de vitalité. Ils sont jeunes et ils ont donc cette idée romantique d'être libre. Ils ont tout fait : poser des bombes, tuer des bureaucrates et des politiciens. Mais, une fois qu’ils obtiennent le pouvoir, ils ne savent pas l'utiliser. Et donc ils ne font que prétendre! Ils profitent de l’euphorie de la victoire et au départ le pays tout entier célèbre aussi le changement. Désormais, le peuple, des gens qui sont des nôtres, sont au pouvoir! Mais, très rapidement, ils se battent les uns contre les autres.
La révolution a un problème et je crois qu'elle l'aura toujours. La révolution est faite par seulement un type de personnes et tous les pouvoirs se retrouvent entre leurs mains. Le désir de pouvoir est quelque chose de très humain. Les révolutionnaires ne veulent pas partager le pouvoir avec les autres mais c’est pourtant ce qu’il faudrait faire.
Il faut trouver des gens créatifs, intelligents qui puissent amener une nouvelle technologie, de nouvelles méthodes dans l’agriculture, des industries modernes et faire en sorte que l’investissement étranger revienne.
Mais, en Inde, c’est exactement le contraire qui s’est passé. Le pays s’est petit à petit écroulé. La qualité de vie des gens s’est détériorée mais personne n’a fait remarquer que ce n’était pas les bonnes personnes qui se trouvaient au pouvoir.
Donnez aux révolutionnaires des honneurs, des prix, des récompenses, des certificats écrits avec des lettres dorées pour qu’ils puissent mettre tout cela dans leur maison. Mais, ne leur donnez surtout pas le pouvoir.
En voyant les situations désastreuses crées par toutes les révolutions, j'ai pensé à la rébellion qui, elle, est individuelle. Car l’individu peut intégrer les forces destructrices aux forces créatrices grâce à la conscience neutre, la vigilance pure sans désirs.
Et si de nombreuses personnes entrent dans cette rébellion qui n'est dirigée contre personne mais contre nos conditionnements et donnent naissance à un homme nouveau en eux, alors le problème ne sera pas difficile à résoudre.
La révolution doit devenir démodée.
Si vous luttez et vous vous battez dans la vie, pensez-vous alors que vous allez pouvoir transformer le monde et changer la situation actuelle? Vous allez en réalité devenir comme ces gens que vous combattez. C’est un principe fondamental de la vie. Choisissez toujours vos ennemies avec précaution! Vos amis, vous pouvez les choisir sans faire trop attention. Avec les amis, vous n’avez pas à vous inquiéter car ils n’ont pas le même impact sur vous que les ennemis. Vous devez être vigilant avec les ennemis car vous allez devoir vous battre avec eux et cela signifie que vous allez devoir utiliser les mêmes stratégies, les mêmes tactiques qu’eux. Et cela va durer pendant des années. Tout cela va vous conditionner. L’histoire de l’humanité est pleine d’exemples prouvant cela.
Joseph Staline s’est avéré être finalement un tsar beaucoup plus dangereux que les tsars qui ont dirigé la Russie avant que le communisme ne prenne le pouvoir. Pourquoi?
Parce que Staline a appris les stratégies des tsars eux-mêmes. Il a appliqué les mêmes tactiques. Il s’est battu, il a utilisé la violence et c’est ainsi que lorsqu’il s’est retrouvé au pouvoir, Staline était déjà une sorte de tsar lui-même, mais un tsar encore plus dangereux puisqu’il avait réussi à évincer les tsars. De toute évidence, il a du être plus rusé, plus violent, plus ambitieux et encore plus machiavélique que le tsar de l’époque. Sinon, il n’aurait jamais pu gagner la bataille du pouvoir contre le tsar.
Et au bout du compte, quand on regarde la vie de Staline, on s’aperçoit qu'il a été bien pire que les tsars. Ses crimes sont à une échelle beaucoup plus grande! Joseph Staline à lui seul a été beaucoup plus violent que tous les tsars réunis. On pense même que Staline aurait empoisonné lui-même Lénine, le chef même de la révolution bolchevique. Lénine était malade et en lui donnant des soi-disant médicaments, Staline l’aurait ainsi empoisonné et donc assassiné. Si Lénine était resté en vie, Joseph Staline serait devenu le numéro trois du parti communiste. Le numéro deux du parti était Léon Trotski. La première priorité de Staline a donc été de faire disparaître Lénine. Après l’avoir tué, il a fait assassiner Trotski. A partir de ce moment là, Staline avait les pleins pouvoirs et il fit assassiner tous les membres du Politburo et tous les grands dirigeants communistes. La raison est que tous ces dirigeants connaissaient eux-mêmes les stratégies employées par Staline et il fallait les faire disparaître.
Ce qui s’est passé en Russie, c’est ce qui s’est passé dans toutes les révolutions.
Le monde que nous avons est un monde magnifique mais simplement, il se trouve entre des mauvaises mains.
Mais quand je dis cela, je ne veux pas dire qu’il faille se battre avec ces mauvaises mains. Je veux dire au contraire : ne soyez pas ces mauvaises mains, c’est tout.
Je n’enseigne pas la voie de la révolution. J’enseigne la voie de la rébellion et la différence est grande. La révolution est politique. La rébellion est spirituelle. La révolution nécessite que vous vous organisez dans un parti, dans une armée et que vous combattez l’ennemi. La rébellion signifie que vous rebellez en tant qu’individus. Vous vous contentez de sortir de l’ornière. Au moins vous refusez de participer à la destruction de la nature.
Et si de plus en plus de gens sortent du système alors le monde pourra être sauvé. Cela sera une vraie révolution, pas politique mais spirituelle. Si de plus en plus de gens se débarrassent du vieux mental et des habitudes qui vont avec, si de plus en plus de gens deviennent de plus en plus aimants, non ambitieux, renoncent à leur avidité et arrêtent de s’intéresser au pouvoir politique, au prestige ou à la respectabilité… Si de plus en plus de personnes refusent de continuer à alimenter ces sales pratiques et commencent à vivre la vie pour eux-mêmes…Ce n'est pas un combat contre ce qui est ancien, c'est simplement s'arracher à l'emprise de l'ancien et c'est la seule manière de l'affaiblir, la seule manière de le détruire.
Si des millions de gens se libèrent de l’emprise des politiciens, les politiciens disparaîtront d’eux-mêmes. Vous ne pouvez pas vous battre avec eux. Si vous les combattez, vous devenez un politicien vous-même. Si vous vous battez contre eux, vous devenez alors avare et ambitieux vous-même. Et cela ne sera d’aucune aide!
Soyez un marginal. Sortez du système. Et rappelez-vous : votre vie est très courte. Pendant les cinquante, soixante ou soixante dix ans que vous serez là sur terre, vous ne pouvez pas espérer transformer le monde. Par contre, vous pouvez espérer profiter de la vie et aimer le monde.
Utilisez l’opportunité que représente cette vie pour célébrer autant que cela est possible. Ne la gaspillez pas dans des luttes et des combats.
Je n’essaye pas de créer une force politique. Non, pas du tout. Toutes les révolutions politiques ont échoué et cela à tel point qu’aujourd’hui seuls les gens aveugles peuvent encore croire aux révolutions. Ceux qui sont capable de voir préconiseront quelque chose de nouveau.
C'est quelque chose de nouveau. Cela a déjà été tenté mais jamais à une telle échelle. Il faut maintenant essayer sur une grande échelle: des millions de gens doivent devenir des marginaux, des outsiders! Par marginal, je ne veux pas dire que vous devez quitter la société pour vivre dans les montagnes. Vous continuez à vivre dans la société mais vous laissez tomber l’ambition, l’avidité et la haine. Vivez dans la société mais soyez aimant et vivez comme si vous n’étiez personne. Vous pourrez alors vous amuser et célébrer. Et en célébrant la vie et en la savourant vous répandrez la joie et l'extase chez les autres.
Nous pouvons changer le monde mais sans combat cette fois-ci. Cela suffit, le monde s’est assez battu! Nous devons changer le monde par la célébration, la danse, la chanson, la musique, la méditation et l’amour et non par la force ou le combat.
L’ancien doit certainement cesser pour permettre au nouveau d’être mais s’il vous plait ne m’interprétez pas mal. Oui, le vieux doit disparaître mais le vieux se trouve à l’intérieur de vous, et non pas à l’extérieur. Je ne parle pas des vieilles structures de la société. Je vous parle des vieilles structures mentales que vous avez. Ce sont elles qui doivent s’arrêter pour que le nouveau puisse être apparaître. Et une seule personne qui se débarrasse de la vieille structure du mental suffit à susciter chez les autres une envie de transformer leurs vies si grande que c’est quelque chose d’assez incroyable et même d'inimaginable! Une seule personne qui se transforme devient un catalyseur pour les autres qui commencent elles aussi alors à changer.
Je vous vous propose la rébellion suivante : débarrassez-vous de vos vieilles habitudes, renoncez à votre avidité, cessez d’alimenter vos grands idéaux.
Et, devenez simplement une personne silencieuse, méditative et aimante. Prenez la vie comme une danse et voyez vous-même ce qui se passe. Et vous réaliserez que tôt ou tard, quelqu’un viendra forcément vous rejoindre dans la danse puis ensuite d’autres viendront.
Je n’ai aucun enseignement politique à proposer. Je suis absolument opposé à la politique. Oui, le vieux doit cesser pour que le nouveau puisse exister. Mais, le vieux doit d’abord cesser à l’intérieur de vous, ensuite le nouveau sera là. Et une fois que le nouveau est en vous, il est contagieux. Il commence à se propager parmi les autres.
La joie est contagieuse! Riez et vous vous apercevrez que les autres se mettront aussi à rire. Il en est de même avec la tristesse. Si vous êtes triste, celui qui vous voit le visage accablé devient lui-même un peu triste. Nous ne sommes pas séparés mais reliés les uns aux autres. Lorsqu’une personne devient joyeuse et que son cœur se met à rire, les personnes autour d’elle sont aussi touchées. Parfois même des personnes lointaines peuvent être aussi touchées. Vous êtes nombreux à faire un long voyage pour venir me voir. Cela signifie que quelque part, mon rire, mon amour sont arrivé jusqu’à vous. En quelque sorte, d'une manière mystérieuse, mon être a touché votre être et vous êtes venu jusqu’à moi malgré toutes les difficultés.
Mais, je ne vous enseigne pas de vous battre contre quoi que ce soit. Lorsque vous combattez quelque chose, cela signifie que vous réagissez à cette même chose. Vous êtes en réaction, quelque chose vous obsède, vous le combattez et alors il y a toutes les possibilités que cette chose va vous dominer, peut être d'une manière indirecte, mais elle va vous dominer.
Friedrich Nietzsche était très opposé à Jésus Christ. Mais, ma propre analyse est que Friedrich Nietzsche était contre Jésus parce qu’il en était en fait très impressionné. Il en était même littéralement obsédé. Friedrich Nietzsche a essayé lui-même de devenir un Jésus Christ. Son fameux livre «Ainsi parle Zarathoustra» est une tentative pour crée un nouvel évangile. Le langage qu’il utilise, les métaphores et la poésie nous rappellent les paroles de Jésus. Et pourtant, Il était contre Jésus! Nietzsche n’a jamais manqué une opportunité pour le condamner et pourtant étrangement ses écrits nous rappellent Jésus. En fait, il en faisait une obsession.
Lorsqu’il a commencé à devenir fou à la fin de sa vie, il signait même ses lettres : «l’Anti-Christ Friedrich Nietzsche. » Il ne pouvait oublier le Christ et cela même lorsqu’il est devenu fou. Est-ce que vous réalisez à quel point sa jalousie pour Jésus l’a dominé toute sa vie? Il aurait pu être un rebelle mais il s’est limité à être un réactionnaire. Il aurait pu amener quelque chose de nouveau au monde mais il n’a pas réussi à cause de son obsession pour Jésus.
Je ne suis pas contre quoi que ce soit, ni contre quiconque. Je ne veux pas que vous soyez libre de quelque chose. Je veux simplement que vous soyez libre. Comprenez la différence : «la liberté par rapport à quelque chose» n’est jamais complète. Le fait que cette liberté soit relative à quelque chose d’extérieur fait qu’elle est conditionnée par le passé. Elle ne peut pas être la vraie liberté.
Extrait de La liberté – Le courage d’être soi-même. Osho
Qui est 0sho ?
Osho est reconnu comme l’un des enseignants spirituels les plus influents et les plus provocateurs du monde actuel et l’Inde, son pays de naissance, lui accorde maintenant une grande considération. Le Dalaï Lama aussi l’a reconnu comme l’un des « maîtres de sagesse » de notre époque. N’appartenant à aucune tradition, il propose une approche nouvelle de la spiritualité et de la vie en société.
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